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Le camion traverse l’autoroute

« Un spectaculaire accident heureusement sans gravité s’est produit hier vers 20 heures sur l’A11, au niveau de Lombron. Alors qu’il circulait dans le sens Paris-Le Mans, le chauffeur a perdu le contrôle du camion, pour une raison qui reste à déterminer. Le poids lourd a alors traversé le rail de sécurité central et a fini dans le fossé des voies opposées. Le chauffeur n’a été que très légèrement blessé. »

Le Maine libre, samedi 18 avril 2009

Pourquoi donc sur cette autoroute
Ai-je soudainement baissé l’allure ?
Je m’apprêtais à doubler camion et voitures
Lorsque j’ai freiné, de quelque chose à l’écoute.

Jusqu’à quatre-vingt dix kilomètres à l’heure ?
Sur la voie de gauche, quelle horreur,
C’est criminel ! diraient certains.
Pourquoi, donc, ai-je appuyé sur le frein ?

Et comme dans un rêve, au ralenti,
Je ne me rappelle même pas avoir entendu un bruit,
J’ai vu glisser vers la gauche ce camion crème
Comme s’il voulait se doubler lui-même.

Cet immense camion d’acier,
Je doutais de ce que je voyais,
A traversé en diagonale toutes les voies
Et s’est retrouvé de biais devant moi.

Je ne me suis sentie concernée, prête à être happée,
Que dans cet endroit exigu
Dans cet angle aigu
Formé entre lui et le parapet.

J’ai eu le temps de prononcer d’un drôle de ton
« Ah mon dieu, mon dieu ! »
Allais-je être broyée au milieu,
Contre ce mur de béton ?

J’attendais le choc de cette queue de serpent propulsée,
Lorsque je l’ai vu, comme dans un rêve, passer
En entier à travers le rail de sécurité
Avec une si grande facilité !

S’était-il, sous le choc, envolé ?
Ou bien était-il en caoutchouc, ce muret ?
Etais-je, alors, déjà totalement à l’arrêt ?
Il ne m’avait même pas frôlé !

Puis il a traversé toutes les voies
De l’autre côté, dans le sens opposé,
Et a fini dans le fossé, comme posé,
Sans heurter qui que ce soit.

Les autres voitures que j’allais doubler
Etaient également arrêtées. Troublés,
Nous n’étions même plus conscients
De pouvoir provoquer en série des accidents.

Comme si un tel événement, forcément,
Devait avoir arrêté tout le monde derrière, pendant un moment !
Nous sommes repartis, évitant au maximum les débris,
Et avons regagné une zone dégagée sur le côté, à l’abri.

Nous sommes sortis de nos véhicules
J’ai dit « ça va ? » sans attendre de réponse, en tremblant.
Nous nous entre-regardions incrédules,
Le teint un peu blanc.

Nous n’avions rien, nous n’étions pas blessés.
Est-ce avant ou après que j’ai
Vu un homme traversant la chaussée,
Suivant du camion, exactement, le trajet ?

Réflexe post-traumatique, en l’occurrence suicidaire,
De bouger, partir, chercher de l’air.
Ou simplement aller porter secours.
J’ai pensé « Il est fou » en regardant autour.

Combien de temps plus tard
Sont arrivés voitures et motards ?
Est-ce quelques secondes ou quelques minutes
Après que le camion ait fait la culbute ?

Le fait est que la vie a repris son cours, a redémarré.
Mais pour qui ? Etais-je encore en vie
Ou simplement en avais-je l’envie
Et, comme dans les romans, ça n’était pas vrai ?

Des appels aux proches m’ont fait comprendre
Que j’étais dans la réalité, qu’il me fallait l’entendre.
Et le mental a pris le relais
Projetant en boucle le film qui venait de se dérouler.

Et de revivre le pourquoi et le comment,
L’irrationnel et le miraculeux :
Pourquoi donc, sur cette autoroute, c’est quand même fabuleux,
Ai-je dû soudain freiner avant que rien n’arrive, apparemment ?

Pourquoi, et je le ressens avec acuité,
Pourquoi donc en cette veille, même tôt,
De départ en week-end et de 24 heures motos
Personne n’est venu nous heurter ?

Si une chance m’a été donnée,
Quand bien même c’est momentané,
Celui qui veille sur moi, je n’oublie pas de le remercier
Et la vie, je sais que je vais l’apprécier.

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Dépendance

Chantonnant, nez en l’air,
J’avançais rêveuse et légère
Ignorant qu’en un clin d’œil
De mon autonomie je ferai le deuil.

Heureusement, nous sommes ainsi faits
Qu’il nous est impossible de voir venir
Les maux que nous prépare l’avenir
Ou nous vivrions catastrophés.

Dur retour à la réalité
Lorsque j’ai vu le trottoir
S’approcher avec célérité.
Pas le temps de m’émouvoir.

Oui, mais ça a craqué
Et ma vie a bifurqué.
Oh pas définitivement,
Mais suffisamment.

Assez pour comprendre
Ce que c’est que de dépendre
Des autres. Soudain se sentir vieux
Même si c’est pour aller mieux.

Sans cesse avoir l’impression de déranger
Mais demander de l’aide pour pouvoir se laver
Et s’habiller sans rien aggraver.
Attendre, comme un enfant, pour manger.

Se vouloir discret, se vouloir indulgent
Devant la perte de temps pour l’entourage.
Mais en même temps se savoir exigeant
Plein de douleurs, plein de rage.

Ravaler son amour-propre mal placé
Devant toute cette sollicitude.
Cette étape va bientôt être dépassée
Bientôt, on retrouvera ses petites habitudes.

En fait, on m’a aidée sans retenue
Et sans cette chaîne de générosité
Alors que j’étais accidentée,
Je ne sais ce que je serais devenue.

Il n’est pas toujours facile d’aider
Mais je sais à présent que d’être dépendant,
D’être de soi dépossédé,
L’est encore moins cependant.

Faire intervenir des institutions
Ne devrait être que l’unique solution
Pour qu’avec nos proches à nos côtés
Nous puissions vivre en toute égalité.

Avoir autre chose à leur offrir,
Que l’on soit ou non introverti,
Que la vue d’un corps décati
Même si par amour ils peuvent le souffrir.

Et sans arrière-pensée qui trotte
Pouvoir rester tête haute
Et n’avoir plus avec eux
Que des échanges affectueux.

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