Archives de catégorie : Emotions

Heureusement

Lorsque je l’ai vue toute perdue des sanglots dans la voix
Parlant de l’anniversaire du décès de son mari,
J’ai pensé qu’heureusement notre amour s’est tari,
Heureusement qu’à présent je suis sans toi.

Lorsque je vois mon amie déprimer
De se voir et de voir son amour vieillir,
Je pense qu’heureusement tes sentiments tu as réprimés.
Heureusement, je ne te verrai pas défaillir.

Lorsque je vois des couples s’étreindre, s’embrasser,
Je nous vois tous deux tendrement enlacés
Et je pense, qu’heureusement, tu as eu peur
Car finalement je ne conserverai que le bonheur.

Cet amour si fragile, nous n’avons su le défendre.
Nous avons laissé les liens se distendre.
Et à défaut d’être à présent vraiment heureux
Du moins ne connaîtrons-nous pas le chagrin d’avoir vécu à deux.

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Rain

Inspiré par le ballet éponyme de Anne Teresa De Keersmaeker,
par l’oeuvre « Musique pour 18 musiciens » de Steve Reich
et la météo

Là.
Odeur
De pluie
Qui arrive.
Lourde senteur
De terre mouillée.
La terre implore les cieux.
Elle n’en peut plus d’attendre.
De cet impudique appel olfactif,
Fiévreuse, elle s’élance déjà vers eux
Leur criant son envie d’être fécondée.

Soudain,
Un silence se fait.
Un nuage passe, rapide.
L’herbe frémit sous sa caresse.
L’onde se propage de loin en loin.
Les premières gouttes tombent enfin.
Elles rebondissent comme des repentirs,
Puis glissent, se ratent ou se cognent, s’unissent
Se multipliant à l’infini, aigües comme des virgules.
Pizzicati assourdissants et joyeux,
Qui pénètrent cette terre avide.
Comment distinguer la terre du ciel
Tous deux intimement entremêlés
Tous deux géniteurs désormais.

L’air se fait plus léger.
Le ciel est bleu tendre.
La terre apaisée
Va pouvoir attendre
Les semis
de l’été.

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La lavandière

Je sais à peine lire et écrire
Mais j’adore faire des blagues et rire.
A l’école, les maîtres se moquaient de moi
Et je n’arrive pas à savoir pourquoi.

Les gens disent à mes parents que je suis belle
Et moi, au lavoir, je bats les draps de l’hôtel.
Penchée au dessus de l’eau qui coule
Je frotte, je frotte de mes mains pleines d’ampoules.

Je ne sais même pas rêver.
Ca n’est pas ainsi que l’on m’a élevée.
Je ne sais même pas si ma vie est un mélo
Ne vivre que pour une seule chose, le boulot.

Ceux du village sont à peine mieux lotis.
De la vie des autres, nous ne sommes pas avertis.
J’ai froid, je gèle et j’aimerais rentrer
Mais si je le faisais mes parents me battraient.

Il paraît que je leur donne du fil à retordre.
Oui, je n’aime pas obéir aux ordres.
Et mes genoux douloureux
Amortissent mes coups de battoirs vigoureux.

Hier mon frère m’a emmenée valser.
Qu’est-ce que je me suis fait tabasser
Car ma photo était dans le journal
Qui relatait qu’il y avait eu un bal.

Mais je m’en fiche. Tant pis pour les coups
J’ai été heureuse un moment.
J’ignore même que je ne saurai donner beaucoup
Lorsque je serai, à mon tour, maman.

Pour l’instant, en bas de la rue de l’Abreuvoir
Rivée à cet inévitable lavoir,
Comme le dira la chanson, je tape, je tape.
La vie n’est-elle qu’une chausse-trappe ?

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Souvenir

Lentement roulant,
Caché derrière ton volant,
Tous les mercredi soir
Après ses devoirs,
Tu la raccompagnais,
Sans rechigner,
En toutes saisons,
A la maison.

Par-dessus l’appui-tête
Delphine alors petiote
Te caressait la tête
De ses menottes.

Elle te contemplait
Si pleine de dévotion,
Si pleine d’affection.
Tu en étais tout déboussolé.

Elle te câlinait tout naturellement.
Ces gestes t’avaient ravi, étonné.
« C’est une fille ! » disais-tu  gêné,
Presque imperceptiblement.

La vie te faisait une blague étrange :
Et à ton air comblé,
On aurait dit qu’un ange
Venait de te confier un doux secret.

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Papy est parti

Il était l’arrière-grand-père
Mais il était encore vert.
Bien sûr, il a pris de l’âge
Mais il vivait, posé, comme un sage.

Il a traversé, si discret, la vie
Sans un mot au milieu des cris
Que personne ne l’a vu défaillir,
Personne ne l’a vu vieillir.

Lorsqu’il a commencé à être malade,
Il ne s’est d’abord pas plaint.
Simplement il partait moins en balade
Pour faire les courses, pour faire le plein.

Lorsqu’enfin le traitement devint trop dur
Il fallut se rendre à l’évidence
Et appeler l’ambulance.
Il arrivait au bout de son aventure.

La chimio lui avait donné une mycose
Il ne pouvait plus manger grand-chose.
Il lui devint impossible d’avaler
Et c’est péniblement  qu’il articulait.

Et, du fond de son lit, il s’inquiète
Pour celle qu’en silence il a aimée.
Elle a pris froid, s’est enrhumée.
Pour le voir, elle ne doit pas faire la navette.

Alors qu’il était en train d’agonir,
Avant que n’arrive le pire,
Que l’on gardait pour soi ce fardeau
Il a pu donner à chacun un cadeau.

Pour certains, quoi que cela lui ait coûté,
Il s’est laissé alimenter
De cuillères de cet amour
Qu’on lui portera toujours.

Pour d’autres, quoique prude, il s’est  laissé masser.
Caresses  tendres et légères
Porteuses de mots qu’on voulait taire,
Qu’on n’osait prononcer.

Pour ma part, ce fut un sourire
Qu’il me faudra, à mon tour, transmettre
Quand viendra l’heure de partir
Quand je serai, moi aussi, l’ancêtre.

Exténué, il ne pouvait plus soulever
Ni sa tête ni ses paupières.
Ma visite s’achevait
Je ne voyais pas qu’elle serait la dernière.

Sur le pas de la porte, je me suis retournée.
Je l’ai vu se redresser
Son visage s’est épanoui,
Et dans un ultime effort, il m’a souri.

Ce que je n’ai pas pu comprendre
Alors que je partais,
(Mais voulais-je l’entendre ?)
C’est que c’est lui qui nous quittait.

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Coeur patchwork

En hiver lorsque fleurissent crocus et perce-neiges
J’ai le cœur atone, dans les blancs, dans les beiges.
D’un crème doux qui protège du froid
Tout engourdi, loin de tout émoi.

Le voici tout petit, tout rabougri
A l’instar des toits devenu tout gris.
A peine perceptible, couleur d’horizon
Le temps que passe cette saison.

Lorsque les jours insensiblement rallongent
Mon cœur s’éveille de l’hivernal songe.
Poudré, irisé, le voici qui reflète
Herbe frisquette et blanches pâquerettes.

Soudain, après quel signal ? la nature explose.
Mon cœur chatoyant à son instar ose :
De lilas, amande et rose il se teint
Avant que d’entrevoir le tien comme un festin.

Lorsqu’il se met à faire chaud,
Que toute chose se meut lentement
Le voici ambre, rouge ardent jusqu’à épuisement
Prêt à se donner comme artichaut.

Mais la bise fraiche revient
Ne laissant derrière elle qu’un goût de bonheur
Fil de la vie qui retient
Les morceaux multicolores de mon cœur.

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Le rire de Sarah

Dans tes yeux noisette
Je vois ce rire qui nous guette :
Il a besoin de complices,
Pour exploser, ce feu d’artifice.

Car ton rire est une danse
Où il faut être au moins deux ;
Tourbillon insouciant et joyeux ;
Invite pleine de confiance.

Ton rire est un doux zéphyr
Qui va sans faiblir.
Ton rire est une chaude brise
Qu’un rien attise.

Ton rire est une cascade
Qui allègrement s’écoule,
Une onde où la joie roule,
Ma coquine et belle naïade.

Cette bulle de bonheur que tu lances,
Je l’ai attrapée avec dextérité.
Et, en récompense,
Sur moi, elle a éclaté.

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Maison de vigne

Une petite maison
Sans tuffeau ni ardoise
Une petite maison
Pas très bourgeoise.

Posée sur le coteau
Comme un château
Mais sans barrières,
Humble comme chaumière.

Abri pour des outils
Refuge des viticulteurs
Contre la pluie, la forte chaleur
Quand le travail ralentit.

On y partage le casse-croûte :
Rillettes et saucissons,
Côteau-du-Loir et Jasnières sans doute,
Entre amis, sans façons.

Et lorsqu’elle est désertée
De toute activité
Les amoureux s’y enlacent,
Tendrement s’y embrassent.

Une maison de vigne
Toujours nous fait signe.
On y va en toute saison
Quelle qu’en soit la raison.

Modeste apparition
Chargée de souvenirs.
Réceptacle d’émotions,
De travail, câlins et rires.

Je l’avais oubliée
Sans que je le sache.
Mais sur ce ciel d’orage acier,
Blanche, elle se détache.

Et perdue dans un autre temps,
Tel un cep, je reste plantée
A l’observer en cette fin d’été,
Étonnée de la reconnaître tant.

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Un gourmand grégaire

Il mange des bonbons,
Les trouve-t-il bons ?
Ou est-il simplement accro
Rivé à son micro ?

Il achète à foison
Toutes sortes de paquets.
De quoi nourrir un banquet
En toute saison.

Il y a les jaunes citron et les verts,
Ceux qui font grimacer de travers ;
Sans oublier les noirs à la réglisse,
Qui sont un pur délice !

Vous pensez que malgré son allure
Il n’a plus vraiment l’âge ?
Tout ce sucre va devenir une vraie gageure
Ca n’est pas très sage !

Ce serait le sous-estimer
Car, en dehors de les aimer,
Ces bonbons sont l’appât alimentaire
De ce gourmet grégaire.

Et dans son bureau vitré
Défile toute une ronde
Passe tout un monde
Irrésistiblement attiré.

Cependant que les mains plongent
Pour attraper ces couleurs
Ses visiteurs songent
Et lui parlent avec chaleur.

Et notre gourmand se régale
De ces visites amicales,
De ce moment sacré
Du partage sucré.

Bonbons gélifiés

Les appâts

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Soif d’amour maternel

Dans le bus un enfant crie,
Désespéré, malgré sa jeunesse ;
Tangible est sa détresse.
Tendrement des gens lui sourient.

Mais ça n’est pas pour eux
Que régulièrement sa mélopée s’élève.
Il veut l’amour de sa mère, il en crève.
On le voit, il ne doit rien lui arriver d’heureux.

Lui, il est là, tassé contre la portière, tout petit,
Comme s’il avait besoin d’être abrité.
Elle, elle lui glisse un regard sans empathie
Et même, parfois, de dureté.

Un mot d’elle ça serait déjà bien
Ca serait entre eux un lien.
Mais derrière ce regard vitreux
On soupçonne tout autre contact désastreux.

A l’arrêt, la famille descend.
Contre une terrasse de café il se rencogne
Tandis qu’effectivement sa mère le cogne.
Du bus, les regarder est indécent.

Il est difficile d’intervenir dans la vie d’autrui
Et contre la violence d’une mère,
Simplement soupçonnée, qu’aurais-je dû  faire ?
Depuis, ce souvenir me poursuit.

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